On se doit de tout savoir pour garder l'avantage | Geoffroy & Odelle

Geoffroy savait bien que son retour à Féerie était quand même quelque chose qui avait fait des vagues. Il n’y avait aucune raison que ça n’en fasse pas au vu de la situation, après tout, parce que ça signifiait quand même que la barrière qui s’était installée entre les deux mondes avait disparu. Ce qui arrangeait clairement son cas, Geoffroy n’allait pas le nier non plus, mais en même temps il avait conscience que ce n’était pas non plus une très bonne chose. Cette barrière avait été installée pour une bonne raison et Geoffroy était bien placé pour savoir qu’on ne pouvait pas vraiment faire confiance aux habitants du royaume du bout de l’océan. Geoffroy ne les portait pas du tout dans son cœur, il n’avait donc aucune envie de les voir débarquer à Féerie. Il comprenait donc la présence de cette barrière, comme le fait que sa disparition soit un souci. Mais en même temps, il était quand même vraiment ravi d’avoir pu revenir et d’avoir retrouvé son épouse.

Et il avait donc conscience que son retour avait fait parler de lui. Et quand il reçu un message énigmatique lui demandant de venir à un rendez-vous, Geoffroy avait conscience que c’était parce qu’il avait traversé l’océan. Il ne savait pas réellement pourquoi on lui donnait un tel rendez-vous, il n’avait pas conscience de ce qu’on allait lui demander. Mais la curiosité le poussa à s’y rendre dans tous les cas, il n’avait aucune envie de ne pas s’y rendre, au cas où que ça puisse… avoir de l’intérêt.

L’homme se retrouva donc devant la maison où il devait rejoindre son rendez-vous, et frappa à la porte en bois. La porte s’ouvrit donc devant une jeune femme que Geoffroy ne connaissait pas du tout. Elle l’invita à entrer dans la maison. En un sens, l’homme devrait sans doute se poser des questions – ce qu’il faisait en réalité –, il devrait se montrer méfiant, mais ce n’était pas complètement le cas non plus. Il ne savait même pas pourquoi.

« Bonjour. » Se contenta-t-il de dire, en montrant le courrier qu’il avait en main et qui venait de cette personne. Quand bien même, la jeune femme savait parfaitement qui il était, visiblement. « Vous m’avez demandé de venir ? »

C’était le cas bien sûr, mais Geoffroy se posait surtout la question de la raison qui avait poussé la jeune femme à le faire venir dans cette maison. Elle avait une bonne raison de le faire venir, après tout. Sinon elle ne lui aurait pas demandé de venir. Geoffroy avait donc besoin de savoir pourquoi il se trouvait ici, mais quelque chose lui disait justement qu’il allait bientôt en savoir plus.

Geoffroy était forcément curieux de savoir ce que cette femme attendait de lui, la raison qui l’avait poussé à le faire venir ici. On ne pouvait pas dire qu’il avait énormément de temps devant lui, quand bien même il n’avait pas autant de responsabilités qu’autrefois, mais forcément son retour avait quand même provoqué pas mal de chose. Il n’avait donc pas spécialement de temps à perdre. Surtout que de toute façon, le jeune homme était bien trop curieux de savoir ce que cette femme avait envie de lui dire pour vouloir attendre qu’elle le fasse. Par chance, Odelle Saurre, puisqu’elle se nommait ainsi, n’avait pas l’intention de tourner autour du pot. Elle l’invita à s’installer, ce qu’il fit donc sans se faire prier, avant d’entrer dans les détails de la situation.

Et l’homme n’allait pas seulement lui apprendre qu’elle était une sorcière – ce qui en soit était déjà quelque chose d’important –, mais elle précisa en prime qu’elle était celle qui était à l’origine de la disparition de la barrière. Rien que cela… Autant dire que ça le concernait quand même beaucoup, au vu de la situation. L’homme avait eu l’occasion de rentrer chez lui, de retrouver son épouse, parce que cette femme avait pris la peine de détruire la barrière. Pourquoi ? Est-ce que Edgar était au courant que c’était elle ? L’homme ne savait pas, et il se doutait qu’il n’allait pas le savoir tout de suite, au vu de la manière dont elle avait continué.

« Vous voulez que je vous parle du royaume du bout de l’océan ? » Demanda-t-il, quelque peu surpris par la demande de la femme. Forcément, de son côté, Geoffroy n’était pas dénué de question, il en avait vraiment une tonne à l’adresse de la sorcière. La femme avait l’intention de s’entretenir un peu avec lui, mais il avait surtout envie de la questionner de tous les côtés. Il aimerait bien pouvoir lui affirmer qu’il n’avait aucune envie de répondre à ses questions, qu’il n’avait pas l’intention de répondre à sa demande, mais elle n’avait pas manqué d’ajouter quelque chose, un détail. En remerciement du fait d’avoir pu rentrer chez lui et surtout d’avoir pu retrouver son épouse. Forcément, au vu de la situation, au vu de ces propos, Geoffroy avait le sentiment d’être un peu piégé quand même. « De quoi voulez vous que je vous parle ? »

Il y avait quand même beaucoup de chose qu’il pouvait bien dire au sujet du royaume du bout de l’océan. En même temps, l’homme avait quand même passé près de la moitié de sa vie dans cet autre royaume, ça avait été sa demeure, contre son gré, pendant de nombreuses années. Alors oui, si Odelle avait envie d’en apprendre plus sur ce dernier, elle avait fait venir la bonne personne. Mais ce n’était pas pour autant que Geoffroy savait par où il pouvait commencer, ce qu’elle voulait entendre précisément. S’il y avait un sujet particulier qu’elle espérait l’entendre aborder.

Geoffroy n’avait en un sens aucune raison de ne pas répondre aux questions de la sorcière sous ses yeux, bien au contraire. Au vu de la situation, il devait sans aucun doute être le mieux placé pour répondre à ses interrogations. Est-ce qu’il pouvait lui faire confiance malgré tout ? En un sens, l’homme ne pouvait pas en être certain non plus, mais il n’y avait rien en tout cas qui le poussait à se méfier de la femme sous ses yeux. Elle était du côté de Edgar non ? il l’espérait en tout cas, sinon il devait être en train de faire une sacrée erreur puisqu’il avait l’intention de répondre aux questions de Odelle. La femme lui demanda donc plus d’information sur le climat politique du royaume du bout de l’océan, si une guerre était sur le point de se préparer. Les questions étaient normales et légitimes, Geoffroy n’avait donc aucune raison d’être étonné de ces interrogations. Après tout, c’était une crainte que tout le monde avait depuis la disparition de la barrière. Et la disparition de cette barrière semblait être l’œuvre de la femme sous ses yeux d’ailleurs. Ce qu’il appréciait, Geoffroy n’allait pas le nier quand même, parce qu’il avait pu rejoindre sa femme. Mais en même temps, il avait parfaitement conscience que ce n’était pas une bonne nouvelle non plus. Pour la simple et bonne raison qu’il y avait ce risque de guerre.

« Je ne vais pas vous mentir, les personnes de ce royaume ne nous porte absolument pas dans le cœur. » Et il se doutait que Odelle n’avait aucune raison de douter de cette information non plus. Après tout, il était logique que les habitants du royaume du bout de l’océan ne les portent pas dans leurs cœurs, au vu de la manière dont les choses s’étaient passées. Geoffroy en avait souffert quelque peu d’ailleurs de l’autre côté de l’océan, quand bien même il savait aussi qu’il avait eu énormément de chance de parvenir à se faire une sorte de place dans cet endroit. Comme d’autres féeriens. « Le climat politique est compliqué, beaucoup de personne reportent leurs soucis sur nous, mais pas seulement. Ils en veulent aussi beaucoup à leur sultan. » Même si Geoffroy ne connaissait pas non plus tous les détails, il savait bien que les personnes les plus pauvres en voulaient énormément à ce sultan qui ne semblait pas avoir quelque chose à faire de leur existence. « De là à dire qu’une guerre se prépare… je ne serais pas capable de l’affirmer. Mais il n’est pas exclu qu’en apprenant qu’il n’y a plus de barrière, les choses se corses pour nous. »

Et en un sens, Geoffroy avait envie de se dire que c’était une bonne chose qu’il ait pu prévenir le roi Edgar que la barrière n’existait plus et qu’il valait mieux se tenir prêt au cas où. Même si ça pouvait ne pas être nécessaire non plus.

Si les informations qu’il avait vis-à-vis du royaume du bout de l’océan pouvaient être utile, Geoffroy devait bien avouer qu’il avait sincèrement envie de les partager. Il ne pouvait pas faire grand-chose contre le fait que la barrière disparue pouvait potentiellement poser problème, mais au moins il pouvait quand même donner un coup de main. Ou en tout cas, il pouvait donner des informations, même s’il n’était pas sûr que ça soit une si bonne chose qu’il discute ainsi avec cette jeune femme. Il était évident qu’il ne devait pas prendre trop de risque et aller à l’encontre de Edgar. Il était évident qu’il ne devait quand même pas prendre le risque de se mettre le roi à dos, il avait conscience qu’il était quand même sur la corde raide. Il ne devait vraiment pas prendre de risque pour qu’on imagine pas qu’il était du côté du royaume du bout de l’océan, ce qui n’était vraiment pas le cas.

Cela dit, il ne pensait pas prendre de risque à répondre aux questions de Odelle, alors c’était ce qu’il faisait. La jeune femme lui demanda s’il était possible que l’autre royaume les mette à mal. Geoffroy apprécierait de simplement répondre qu’ils ne risquaient rien, mais il savait bien que ce n’était pas le cas.

« J’aimerais vous répondre que non… » Dit-il dans un soupire avant de reprendre la parole. « Mais même s’ils ont clairement moins de moyen que nous. » Et il pouvait clairement le témoigner, parce qu’il avait quand même eu l’occasion de voir les deux royaumes. Le royaume du bout de l’océan n’avait pas autant de richesses, autant de pouvoir que Féerie. Alors que ce dernier royaume avait quand même encore des gardes capables de se battre, quelque chose à protéger. Mais les autres n’avaient justement plus grand-chose à perdre au final. « Ils ne manqueront pas de motivation malheureusement et même si nous avons de meilleur moyen, je dirais que nos forces se reposes peut-être un peu trop sur leur laurier. » Ce n’était pas forcément le cas en soit, mais il fallait quand même reconnaître que les gardes de Féerie n’avaient pas autant de chose à régler qu’avant, qu’ils étaient loin de cette guerre. Alors que le royaume du bout de l’océan devait encore avoir le sentiment d’y être encore.

Autant dire que Geoffroy ne se montrait pas réellement sûr de lui, mais en même temps il ne pouvait pas affirmer quelque chose sans le savoir non plus. Il avait envie de donner plus d’information, mais il faisait de son mieux. En tout cas, il avait conscience que la situation était vraiment compliquée, qu’ils risquaient énormément avec la disparition de la barrière et qu’ils pouvaient donc se retrouver dans une nouvelle guerre malheureusement. Ce que Geoffroy n’avait pas envie, il avait perdu beaucoup trop de chose la dernière fois.

Maintenant que Edgar était au courant de la situation, il pourra prendre les mesures s’imposant. Sur ce point, Geoffroy espérait que ça allait bel et bien être le cas, que le roi de Féerie parviendra à faire ce qu’il fallait. Geoffroy espérait vraiment qu’ils allaient pouvoir faire quelque chose si jamais le royaume du bout de l’océan décidait de prendre leur vengeance. Féerie se portait bien, à première vue, mais en même temps l’ancien garde royale savait aussi qu’ils n’avaient pas spécialement eu à subir d’assaut depuis la guerre, ils avaient eu l’occasion de se reposer sur leurs lauriers. Les habitants du royaume du bout de l’océan n’avaient pas forcément les moyens de se lancer dans une guerre, on ne pouvait pas réellement dire qu’ils avaient les moyens pour beaucoup de chose. Sauf qu’en même temps, ils avaient un grand désir de vengeance. Pas forcément le sultan, qu’il savait vivre dans une petite vie confortable, mais le peuple globalement vivait dans la misère et ils avaient des reproches à faire à beaucoup de monde, notamment les féériens. Ce n’était pas pour rien que la vie de Geoffroy dans ces contrés n’avaient pas toujours été de tout repos.

Geoffroy espérait donc que ça allait bel et bien pouvoir se passer, même s’il avait aussi conscience que ça risquait d’être complexe. Dans tous les cas, l’homme ne pouvait pas faire grand-chose non plus concernant tout ça, il ne pouvait pas prendre de décision. Il allait se contenter de suivre le mouvement en espérant que le souverain de Féerie allait lui accorder sa confiance. Ce n’était pas gagné bien sûr, mais Geoffroy espérait quand même que ça allait finir par arriver.

Dans tous les cas, Odelle lui affirma que maintenant qu’elle avait bien connaissance de la situation, elle aimerait bien avoir l’occasion de lui demander un service. Geoffroy était un peu étonné, parce qu’on ne pouvait pas réellement dire qu’on faisait appel à lui dernièrement. Au contraire, c’était même l’inverse, la plupart des gens se méfiaient de lui. Il ne savait pas si c’était une si bonne chose qu’elle ait envie de lui demander un service, mais en même temps, l’homme ne pouvait pas réellement se permettre de dire non.

« Vous avez besoin de quoi comme service ? » Demanda-t-il simplement.

Il ne disait pas oui, il ne disait pas non, parce qu’il ne pouvait pas réellement se permettre de le faire. Il avait besoin de connaître ce que la jeune femme sous ses yeux avait besoin avant de lui dire s’il acceptait de l’aider ou non. En espérant que ça ne soit pas quelque chose au dessus de ses forces. Après tout, une mission voulait tout et rien dire en même temps.

Geoffroy se demandait vraiment ce que Odelle attendait de lui, quel genre de service il pourrait lui rendre. L’ancien garde royale n’était pas certain que ça soit une si bonne chose non plus qu’il prenne la décision de rendre un service à cette femme. Mais il ne pensait pas prendre trop de risque à au moins l’écouter lui parler de ce qu’elle avait en tête. La femme reprit la parole donc, en lui disant qu’il n’avait pas eu le temps d’avoir des enfants avec son épouse. C’était bel et bien le cas et entendre ces mots n’étaient pas forcément agréable pour l’homme. C’était l’un de ses plus grands regrets. Même s’il était heureux d’être de retour à Féerie, qu’il était heureux d’être auprès de son épouse, il regrettait quand même de ne pas être rentré suffisamment tôt pour qu’ils puissent envisager d’avoir des enfants. Ce n’était pas si grave que ça en soit, parce qu’ils étaient quand même ensemble et heureux ensemble, mais ça n’enlevait pas qu’il y avait quand même un peu de regret.

Mais apparemment, Odelle avait donc une solution à lui apporter avec de la magie. Est-ce que c’était une bonne chose ? Geoffroy ne pouvait pas nier qu’il en avait envie quand même, il avait envie de pouvoir avoir des enfants avec son épouse. Cela dit, il n’était pas certain d’être bien heureux d’utiliser de la magie. Et la condition était importante quand même, il fallait qu’il devienne l’espion, son informateur, qu’il lui rapporte tout ce qui se passait. Geoffroy n’était vraiment pas à l’aise avec cette idée, il n’avait aucune envie de se mettre Edgar à dos parce qu’il donnerait des informations à la sorcière, même pour obtenir la possibilité d’avoir des enfants avec Jocaste.

« Je pensais que vous n’auriez pas besoin de qui que ce soit pour obtenir des informations. » Dit-il, plus dans le but de répondre quelque chose, qu’autre chose. Il ne savait tout simplement pas quoi répondre, il ne savait donc pas forcément comment aborder les choses. Alors, il tentait simplement de gagner du temps, pour réfléchir à toute vitesse à ce que la femme sous ses yeux lui demandait. « Je ne nie pas que de ne pas avoir d’enfant avec mon épouse n’est pas un de mes plus grands regrets. Mais ma place ici est contestable. Je ne peux pas prendre le risque de me mettre le roi à dos. » Et se mettre une sorcière à dos sans doute pas non plus, mais il se montrait parfaitement honnête.

La femme se contenta de lui affirmer que c’était comme il le voulait, précisant tout de même qu’il y avait peu de risque parce qu’elle ne voulait pas de mal au roi. Geoffroy n’était quand même pas né de la dernière pluie, il avait conscience qu’il ne pouvait pas faire confiance à la première personne venue lui affirmant qu’elle ne voulait que du bien au souverain. En soit, peut-être qu’il serait entièrement gagnant à donner des informations à la sorcière en échange de la possibilité d’avoir des enfants avec sa femme. Mais il ne pouvait pas non plus prendre le risque de se retrouver dans une situation complexe juste parce qu’il aurait accepté de donner des informations à quelqu’un. Peut-être que ça ne changerait rien pour lui d’aider cette femme, peut-être qu’il ne se mettrait personne à dos en le faisant, mais tout cela n’était que des possibilités. Il ne pouvait pas être certain à cent pour cent de la parole de la femme sous ses yeux, il ne pouvait pas prendre le risque de lui faire confiance. La seule possibilité pour lui de lui faire confiance serait que le roi lui-même lui affirme qu’il pouvait effectivement informer la femme, sauf que quelque chose lui disait que si elle pouvait obtenir les informations de la part du roi, elle n’aurait pas besoin de lui. Oui, tout cela était beaucoup trop étrange pour qu’il puisse juste croire cette femme sur parole.

« Si vous ne voulez que le bien du roi, alors parlez lui directement. » Dit-il en haussant les épaules.

Geoffroy ne pouvait pas complètement ignorer la proposition de la femme sous ses yeux non plus, il devait bien avouer qu’il y avait quand même quelque chose d’agréable d’avoir la possibilité d’avoir des enfants avec son épouse quelque chose qu’il ne pouvait pas envisager avec son absence. C’était tentant, trop tentant même justement pour que cela soit simplement innocent.

« De mon côté, je ne peux pas prendre le risque de faire quoi que ce soit qui ne soit pas dans les règles. »

Edgar l’avait à l’œil, il allait le surveiller constamment, il allait s’assurer qu’il n’était pas à la botte des habitants de l’autre bout de l’océan. Le roi ne lui faisait aucune confiance et il comprenait bien sûr pour quelle raison il ne lui faisait pas confiance, alors il se devait de ne rien faire qui puisse donner le sentiment qu’il n’était pas digne de confiance.